République tunisienne
Assemblée Nationale Constituante
Bardo, 10 août 2012
N° 281
Première partie. Dispositions générales
Article 1er.
Sont soumis à l’audit tous les accords de prêt conclus par le gouvernement tunisien du 8 novembre 1987 au 14 janvier 2011, afin de déterminer la part odieuse de la dette extérieure de la Tunisie.
Article 2.
L’audit de la dette est effectué dans le cadre d’une commission qui bénéficie de l’autonomie administrative et financière.
Ladite commission est tenu de présenter son rapport à la commission des finances de l’Assemblée nationale constituante où, à défaut, à l’institution qui exerce la fonction législative.
Article 3.
Le siège de la commission de l’audit de la dette extérieure est Tunis.
Article 4.
L’opération de l’audit signifie dans cette loi le travail qui consiste à examiner, à suivre et à évaluer les négociations concernant les dettes ainsi que le rééchelonnement des dettes. Elle consiste aussi à déterminer la responsabilité qui découle de toute mauvaise utilisation qui s’oppose à l’intérêt national du peuple tunisien.
L’audit de la dette vise aussi à déterminer l’origine des ressources financières extérieures et la manière dont elles ont été utilisées, afin de vérifier la légitimité, la transparence, la qualité et la qualification concernant toutes ces ressources, sur la base de la convention de Vienne de 1969, et les règles et coutumes internationales en matière de l’audit financier, économique et social.
Deuxième partie. Composition de la commission de l’audit
Article 5.
La commission de l’audit est composée des membres suivants :
Le président de la commission financière de l’Assemblée nationale constituante ou l’institution qui exerce la fonction législative ;
Le ministre en charge de l’économie ;
Le ministre en charge des finances ;
Le ministre du développement et de la coopération internationale ;
Le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie ;
Le premier président de la cours des comptes ;
Le président de la haute cour du contrôle administratif et financier ;
Le président de l’instance nationale de la lutte contre la corruption ;
Six représentants d’organisations civiles et de citoyens qui ont une expérience dans le domaine de l’audit et la dette publique ;
Quatre experts comptables ;
Deux spécialistes juristes, le premier dans le droit tunisien, et le second dans le droit international ;
Quatre représentants des institutions internationales qui ont une renommée mondiale dans des domaines en rapport avec le sujet.
Article 6.
Après leur nomination par l’Assemblée nationale constituante, les membres de l’audit élisent, à la majorité simple, un président de la commission, un vice-président, un rapporteur et les membres du Secrétariat général.
La commission peut constituer des groupes de travail composés de membres de la commission, de représentants de la société civile et des institutions de l’Etat.
Troisième partie. Fonctions de la commission de l’audit
Article 7.
La commission prend en charge le choix de la méthode de réalisation d’une révision générale des dettes. Cette révision concerne le capital, les intérêts, les charges et les dépenses complémentaires. La révision concerne aussi toutes les formes de renégociations, de restructuration et toutes autres formes de gestion financières qui ont été exécuté au cours de la période susmentionnée dans le premier article de cette loi. Elle vise aussi à établir un inventaire de toutes les sommes remboursées.
La commission réalise aussi l’audit de tous les contrats et conventions conclues par les institutions relevant de l’Etat et la manière de leur obtention par le secteur public et par le secteur privé, dans le cas où elles ont été contractées avec des garanties émanant de l’Etat tunisien au profit d’institutions financières, Etat étranger, organisations ou institutions nationales ou internationales aussi bien publiques que privées.
Dans tous les cas, la commission de l’audit doit réviser :
Les études techniques, les documents financiers et sociaux et tout autre document ayant été utilisé pour justifier la demande de prêt ;
Les sommes des prêts et les devises dont lesquels ils ont été contractés, les intérêts qui y ont été appliqués, les commissions, les frais et les charges qui s’y rapportent ;
Les conditions de négociations en comparaison avec la réalité économique, financière et commerciale ;
Les conditions des plans d’ajustement structurel et l’évaluation de leurs résultats ;
La manière dont ces fonds ont été alloués et utilisés de manière effective ;
Toutes les répercussions dues à l’utilisation de l’ensemble des prêts et la recherche de toute autre condition ayant un rapport avec cela ;
L’identité des personnes qui ont accomplies les procédures qui ont conduit à la conclusion des engagements financiers ou bien qui ont soumis l’emprunteur tunisien à ces engagements ;
Les mécanismes de résolution des conflits et le choix des lois qui ont servi de fondement à ces contrats, le degré de leurs concordances et leur conformité avec les grands choix nationaux.
Article 8.
La commission détermine comment utiliser les informations qu’elle obtient afin de réaliser une base générale de données pouvant servir par la suite à la réalisation d’audits nationaux indépendants et nécessaires de l’état de l’endettement, de la politique économique et de l’environnement financier et ses conséquences pour le développement.
Article 9.
La commission a la charge de la mise en place d’un système transparent de données dans le cadre d’une base de donnés aussi bien pour la réalisation d’opérations d’analyses et d’audits des dettes antérieures, que pour des opérations financières futures.
Article 10.
La commission émet son avis et présente ses recommandations à la commission qui exerce le pouvoir législatif à la fin de l’audit, y compris les recommandations concernant l’amélioration future du système d’emprunt extérieur.
L’audit d’une dette donnée par la commission de l’audit n’implique pas la suspension de son paiement.
Article 11.
La durée de l’audit est fixée à dix-huit mois.
La commission soumet des rapports périodiques trimestriels à l’Assemblée nationale constituante.
Article 12.
Les obligations du président de la commission de l’audit sont :
La convocation aux réunions ;
Représenter la commission devant les commissions nationales, devant l’Assemblée nationale constituante et la commission en charge du pouvoir législatif ;
Toute requête concernant l’acquisition des informations que requiert le travail de la commission auprès de toutes les parties du secteur public.
Quatrième partie. Prérogatives de la commission
Article 13.
La commission de l’audit bénéficie, dans le cadre de sa mission, des prérogatives suivantes :
Fixer et déterminer la charge de coordination entre les différents membres de la commission ;
Mettre en place les résolutions internes nécessaires à son bon fonctionnement ;
Déterminer et engager des entreprises locales et internationales d’audit en conformité avec les modalités et les normes en vigueur ;
Rassembler les rapports concernant la révision des comptes et la vérification des études attribuées aux commissions techniques et aux unités spéciales dans les ministères concernés ;
L’approbation des budgets annuels et des plans de fonctionnement qui concernent son propre fonctionnement ;
Solliciter l’aide technique auprès d’institutions du secteur public ;
L’obtention d’informations nécessaires à l’accomplissement de ses fonctions auprès des différentes parties et administrations publiques sans que l’on puisse lui opposer le secret professionnel, fiscal ou autre ;
Proposer les règles constitutionnelles et les politiques générales dans le domaine de la consolidation du contrôle de la dette publique.
Cinquième partie. Dispositions finales
Article 14.
Le budget de la commission est intégré dans le budget général de l’Etat sous la supervision du ministère des finances.
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Remarque :
Le présent ‘Projet de loi portant sur l’audit de la dette extérieure de la Tunisie projet de loi’ a été déposé à l’Assemblée Nationale Constituante par Mme Mabrouka Mbarek (élue CPR) et signé par 13 autres membres de l’ANC appartenant à tous les courants et partis politiques représentés en son sein. Seul-e-s (à ma connaissance) les élu-e-s des partis Ennahdha et El Joumhouri ne l’ont pas signé. Espérons que lors de la discussion et du vote de ce projet ils rallient l’ensemble des élu-e-s en votant ‘oui’ à l’audit de la dette du dictateur, car il s’agit tout de même d’environ 150 milliards de dollars ; soit l’équivalent de 10 budgets actuels de l’Etat, qui ont constitué la somme des transferts financiers au titre de la dette (court, moyen et long terme), emprunts nouveaux + service de la dette au cours des 23 années de dictature.
Traduit, à partir de l’original en arabe, par FATHI CHAMKHI (porte-parole deRaid Attac Cadtm Tunisie)
http://fathichamkhi.over-blog.com/article-projet-loi-audit-dette-exterieure-tunisie-110901335.html
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